L’homme aux chats…

Ce matin, détour au point presse pour acheter des clopes. Devant moi, un petit Monsieur, la cinquantaine approchante, interpelle fébrilement la vendeuse :
« Madame, vous avez mon chat ? »
Après quelques secondes d’incompréhension, la vendeuse reconnaît l’homme aux chats, lui adresse un large sourire : « oui, j’ai votre chat ! » et s’enfuit dans l’arrière-boutique.
Moi, j’attends mon tour, oubliant (pour un temps) mes clopes quand je constate l’état de nervosité de l’homme aux chats… il danse d’un pied sur l’autre, tremble un peu, impatient de voir la vendeuse revenir…
Après une petite minute, la buraliste réapparaît tenant dans ces mains… un chat … sous blister ! Un petit chat d’une dizaine de centimètre en plastique gris, empaqueté avec une feuille cartonnée au format A4, précisant, outre le descriptif du félin, le numéro de cette édition.
49.
Je suis derrière l’homme aux chats, je sens son calme revenir, il ne s’agite plus, le corps entier tourné vers le blister que lui tend la buraliste.
« C’est bien le numéro 49 ? »
« Oui, c’est bien ça, c’est le chat 49 »
L’homme farfouille alors frénétiquement dans son porte-monnaie, extirpant de là quelques euros qui lui permettront d’adopter définitivement SON chat numéro 49.
49 chats ! Cet homme possède chez lui 49 petits chats en plastique ! Je les imagine mis en scène sur une large étagère dédiée à cette passion, leurs regards figés tournés vers leur détenteur comblé.
Je vois l’homme aux chats rassembler péniblement les derniers centimes d’euros qui lui manque (la maison ne fait pas crédit !).
Ce spectacle me file soudainement un cafard monstrueux, en pensant à la vie de cet homme, dont la passion consiste à dépenser ses petits sous pour collectionner ces morceaux de plastoc grossièrement modelés.
…
L’homme se retourne pour quitter l’établissement et je vois alors son visage. Transformé ! Sa joie, sa plénitude, ne faisaient aucun doute.
Mon cafard envolé, j’étais vraiment content pour lui.
Dilapider ses petits deniers pour des merdes moches en plastique … Et alors ? Si c’est la garantie d’un bonheur simple et intense…
Qui suis-je pour juger ?
J’aime bien l’homme aux chats…